S'autoriser à être soi, sans peur et sans malaise
Oser ! Oser nous déployer, occuper pleinement notre place, nous mettre dans la lumière, utiliser à fond nos capacités et nos talents, nous révéler… Nous avons tous le potentiel pour réussir dans notre vie, mais parfois, des raisons obscures nous en empêchent. Alors, nous ne risquons rien ou peu, nous avons des peurs souvent infondées de nous mettre en avant, de risquer d’écraser les autres, de nous sentir rejetés, d’être enviés… Pour quelles raisons nous ralentir ou nous interdire de déployer nos ailes, pourquoi rester au stade du petit oiseau quand nous avons le potentiel de devenir un grand aigle ?
L’affirmation de soi en famille, acceptée ou non ?
Voici l’exemple d’une personne explicitement empêchée de se déployer complètement. Un homme très introverti, doutant de lui-même et sans aucune confiance en ses ressources et qualités, consultait pour comprendre d’où cela pouvait venir. Il était brillant intellectuellement, mais il ne s’autorisait pas à s’exprimer, à se mettre en avant, à occuper sa place dans sa famille. Deuxième après un garçon, avec qui sa relation était tendue, il se sentait empêché d’exister. Ses rapports avec son père étaient également difficiles, ils n’arrivaient pas à se connecter l’un à l’autre, à vivre leur relation père-fils, ce dernier ayant peur du jugement de son père. Avec sa mère, il ne parvenait pas à parler de son malaise, de son impression de ne pas avoir le droit d'être lui-même.
En travaillant en thérapie, il est arrivé à conscientiser qu’il n’avait pas été autorisé ni encouragé à utiliser pleinement son potentiel intellectuel, et ce, pour ne pas risquer de "dépasser" son frère aîné qui l'aurait mal vécu, et indirectement son propre père (qui, inconsciemment, refusait de se sentir moins brillant que son fils). Il lui était reproché de répondre trop vite à la place de son frère et demandé d’arrêter de faire son intéressant avec toutes ses questions et sa curiosité naturelle. On lui avait dit que ce n’était pas bien d’étaler sa science et qu’il devenait prétentieux. Et voilà que cet homme finit par se conditionner à ne plus être lui-même, à douter de ses capacités, à raser les murs, à se faire tout petit, à étouffer sa spontanéité, à s’éteindre de l’intérieur.
Quand nous sommes empêchés de déployer nos ailes, cela est souvent vécu dans l’incompréhension et un fort sentiment d’injustice. Cela nourrit la colère, la frustration, la culpabilité, le doute sur soi, l’impression d’être de trop, l’auto-sabotage dans la scolarité et les projets professionnels, le sentiment d’être un imposteur.
Quand l'interdiction de se déployer est plus implicite
Cet homme avait donc l'interdiction d'utiliser entièrement son intelligence, au motif de ne pas écraser son frère aîné ou de paraître prétentieux. Parfois, les contraintes sont plus inconscientes, la personne sent qu'elle est retenue dans sa réalisation personnelle, qu'elle va d'échec en échec, qu'elle n'arrive pas à mener à bien un projet, qu'elle se dévalorise et ne postule pas aux emplois qu'elle pourrait obtenir... mais ne sait pas pourquoi elle fonctionne comme cela.
Il peut être intéressant alors de chercher au sein de son arbre généalogique si un événement, un traumatisme, un code de loi familial n'est pas la racine de son malaise. Quelle est l'ambiance familiale ?
Est-ce que chacun est autorisé à réussir, à développer des affaires, à "faire du business" ? Une personne me disait combien la réussite, liée à l'argent, était vue comme un tabou : "c'est malhonnête de gagner beaucoup d'argent chez moi" (c'était lié à un ancêtre qui avait fait faillite et avait mis en difficulté beaucoup d'employés). Est-ce que les talents de chacun sont reconnus et encouragés ? Une femme voulait intégrer une école très prestigieuse et elle en avait toutes les capacités. Ses parents ont refusé. Elle a fini par comprendre que c'était son père (qui avait fait peu d'études) qui ne voulait pas qu'une femme puisse être à ce niveau-là, et que plus largement, beaucoup de femmes de la famille avaient été contrariées dans leur trajectoire professionnelle parce que "les femmes dans la famille ne peuvent pas paraître supérieures aux hommes". A t-on le droit de choisir tel ou tel métier sans avoir l'impression de trahir sa famille ?
Un enfant de remplacement (conçu après le décès tragique et prématuré d'un frère ou d'une soeur et dont le rôle inconscient est de remplacer le défunt) aura toutes les peines du monde à se réaliser, à exister en tant que personne unique, s'il n'en n'a pas l'autorisation explicite de ses parents.
La peur de "trop briller"
Beaucoup de personnes associent : occuper sa juste place en mettant en œuvre les moyens de se réaliser et de réussir ses objectifs / et trop briller, prendre trop de place, risquer de faire de l’ombre aux autres qui auraient peut-être moins de chances, moins de succès, moins de potentiel…
Le travail qu’il est possible de faire sur soi, c’est de cesser la comparaison (j’ai plus que…), et de se dire que chaque personne est unique, dotée de qualités, d’un potentiel, chacune a sa place, ses désirs, et aussi ses souffrances, son passé… Cela fait partie de la vie, et parfois nous pouvons penser que nous avons plus de chance que... donc nous refermons nos ailes pour ne pas trop nous étendre, susciter trop de jalousie ou d’envie, pour ne pas passer pour quelqu’un de suffisant, d’orgueilleux, par peur d’écraser les autres.
Monique de Kermadec, dans son ouvrage sur les femmes surdouées, écrit très justement que : "Lorsqu’elle fait le pas vers son don, elle éprouve le besoin de s’en excuser. Comme si sa supériorité retirait quelque chose aux autres". En effet, cela s’applique à chacun (pas uniquement aux personnes surdouées), nous pouvons ressentir une culpabilité à avoir plus que les autres et donc à avoir l’impression de retirer quelque chose aux autres. Il est nécessaire d’enlever de notre croyance le "trop", nous n'avons pas trop, ne brillons pas trop, nous brillons simplement parce que nous avons tous notre unicité, parce que nous avons tous un chemin à prendre, parce que l’humain est riche de ses qualités, de ses ressources, de son intériorité… tout en veillant à ne pas s’en enorgueillir, il est important de s’en réjouir et parce que, bien assumés et utilisés, nos talents serviront aux autres ! D’où la richesse partagée avec ceux qui sont si différents de nous.
Cela me fait penser à certaines personnes si peu convaincues de leur valeur, et sans même ouvrir la bouche, traduisent par leur langage non-verbal cette plainte : "excusez-moi d’exister…". Au contraire, nous aurions envie de leur répondre : "Mais oui, autorise-toi à exister ! Tu es là, ne gâche pas ta vie, déploie-toi, fais fructifier tes talents !" Et comme le dit Anselm Grün : "Deviens ce que tu es", c’est-à-dire, deviens ce pour quoi tu as été créé avec toutes tes qualités et tes ressources.